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Post-Scriptum, Gildas Richard
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3 janvier 2005

Xavier Grall, l'envie d'écrire les chroniques

 

Je pense à vous, Xavier Grall

 Ainsi, certains hommes nous donnent-ils l'envie. Je pense à vous, Xavier Grall, parce que vous êtes de ceux-là. Souvenez-vous. Du village de Botzulan qui vous était si cher, vous chroniquiez chaque semaine ce que les vents vous disaient. Vous parliez des coins de terre sur lesquels, des années durant, vous aviez été grand reporter pour le journal La Vie. Dans un cadre grisé, sur une colonne, vous disiez la colère, l'admiration, l'espoir et le questionnement. Parfois aussi, il y avait au cœur de vos lignes le tourment de l'inconnu qui dévore. Et moi, je vous attendais. Le jeudi vous arriviez, et si ce jour était d'Ascension ou de grève postale, la ponctuation du temps ordinaire en souffrait. Une petite photo accompagnait votre billet. Chemise blanche et mèche rebelle, comme une virgule intempestive qui dirait que la plume restera vive, qu'elle sera sémaphore contre l'endormissement qui guette. Tout vous était inspiration, le bruit des autres et le rire de vos filles, l'humeur des cieux et l'espoir des malgré tout. Je pense à vous, Xavier Grall. A ce texte sur le chagrin, cet autre sur le cœur dépeuplé et celui-ci où vous définissiez la vieillesse non comme un âge mais comme une attitude : celle du refus d'aimer. Et puis ce dernier, écrit le 10 décembre 1981, veille de votre mort. Vous y parliez de tous ces souvenirs de mioche qui remontent lorsqu'on ouvre la boîte de fer blanc où sont rangées les photos… Je n'étais plus mioche. J'avais 16 ans lorsque j'ai reçu votre dernière chronique. L'hiver avait froid et la rose de mai avait encore toute son audace. En Pologne, un ouvrier avait le poing vainqueur. Que reste-t-il ? Les roses fanent, les chiffons s'étiolent et les photos jaunissent… Restent les mots, Xavier Grall. Vos mots qui nous préservent de la vieillesse. Vos mots qui donnent envie…

(mai 2001)

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